Oronce Fine
Considéré par la postérité comme le restaurateur des mathématiques dans la
France de la Renaissance, Oronce Fine est aussi astronome et cartographe. Re-
tour sur cet homme de sciences plein de ressources, son histoire, ses œuvres
connues et méconnues!
le 20 décembre 1494 à Briançon, Oronce Fine (ou Oronce Finé, Oronteus
Finæus, Oronce Fineo) est un homme de sciences aux multiples facettes. Sa car-
rière commence dans l’édition et l’imprimerie, d’abord en tant que correcteur. Il
collabore en 1515 à son premier ouvrage, Theoricae novae planetarum, id est septem
errantium syderum de Georg Peurbach.
A partir de 1516, il devient professeur de mathématiques, tout d’abord au col-
lège de Navarre puis à celui de Maître Gervais, sans pour autant délaisser l’édi-
tion. Son premier livre signé en tant qu’auteur, Aequatorium planetarum vnico instrumente comprehensum (1526) est
un traité astronomique concernant les équatoires, instruments basés sur le système de Ptolémée permettant
de connaitre les positions des planètes grâce à un modèle géométrique.
Fine devient lèbre en 1531 lorsqu’il prend fait et cause pour les mathématiques avec son Epistre exhortative
touchant la perfection et commodite des ars liberaulx mathematiques dédiée à François Ier, pour revaloriser cette
branche scientifique. Il souhaite surtout que l’enseignement de la discipline soit renouvelé et se répande au-
delà des universités. Le poème convainc vraisemblablement le roi, qui crée une chaire de mathématiques au
sein du tout nouveau Collège de France, pour laquelle Fine est nommé lecteur royal. Le mathématicien avait
d’ailleurs lui-même suggéré cette création à la fin de sa lettre :
Finablement pour le propos conclure,
Onc homme n’eust l’intelligence pure
D’aucun scavoir sans leur enseignement :
Plaise toy donc affin que leur cours dure,
Ordonner un qui jour & nuyt procure,
Les demonstrer à tous publiquement.
Et ce faisant l’on verra briefvement
France flourir & passer en doctrines,
Les nations, & gens circunvoisines.
(Epistre exhortative [...], par Oronce Fine, 1552-1553)
La même année, il conclut la première version de son ouvrage le plus important : la Protomathesis, considérée
comme un recueil encyclopédique des savoirs. Il s’agit de quatre traités richement illustrés comprenant des
livres d’arithmétique, de cosmographie, de géométrie et de gnomonique.
Fine est considéré comme le « restaurateur des mathématiques en France ». Ses ouvrages et ses cours renou-
vellent l’enseignement des mathématiques, dans une optique proche de la vulgarisation scientifique. Il tente
de populariser les mathématiques et l’astronomie en simplifiant son propos et en faisant évoluer les modèles
éditoriaux, à l’image de la version abrégée et remaniée en petit format (in-octavo) de sa Protomathesis destinée
aux étudiants.
Fine est aussi inventeur. Ses textes concernant la réalisation de cadrans solaires et d’instruments mathéma-
tiques, comme le très coloré Un bref et singulier Traicté touchant la composition et usaige d'un instrument appellé le quar-
geometrique…, sont reconnus comme novateurs. Il contribue aussi à la alisation de l’horloge astronomique
et planétaire actuellement conservée à Paris, à la Bibliothèque Sainte-Geneviève. Celle-ci comporte plusieurs
cadrans donnant l’heure et la position de huit planètes. Il s’agit de la plus ancienne horloge planétaire conser-
vée en Europe !
Mathématicien, astronome, inventeur, Oronce Fine est également célèbre pour son activité de cartographe.
La Renaissance est en effet une période cruciale dans l’évolution de la cartographie occidentale notamment
avec le développement de l’imprimerie et la diffusion des cartes. Les géographes, ou cosmographes, se fon-
dent alors sur une représentation du monde héritée de Ptolémée mais également sur les découvertes et écrits
des navigateurs.
Tout cela n’échappe pas à Fine. Grâce à son travail d’imprimeur, il s’intéresse alors à la géographie et à la car-
tographie en se basant sur son savoir mathématique. Il se préoccupe plus particulièrement du calcul des lon-
gitudes et des latitudes, via un « méthéoroscope géographique » ford’un astrolabe et d’une boussole, et
commence à réaliser des cartes en expérimentant de nouvelles projections.
Nova totius Galliae descriptio / Orontius F[ine] delphinas faciebat - 1553
Nova totius Galliae descriptio / Orontius F[ine] delphinas faciebat - 1553 - (Détail ciblé sur notre région l’on peut
apercevoir Villeneuve, Penne, Hautefage, Villeréal… ndlr)
En 1525, Fine propose une première édition de sa carte de France, la Nova totius Galliae descriptio. Cette der-
nière, toponymes en français et en latin s’entremêlent, rencontre un vif succès. En effet, c’est la première
carte de France de cette dimension, dressée et publiée au sein du royaume. Nous en connaissons aujourd’hui
5 éditions imprimées entre 1525 à 1557.
Poursuivant ses recherches, Fine réalise en 1531 une mappemonde bi-cordiforme, Nova et integra universi orbis
descriptio, suivie quelques années plus tard, vers 1534-1536, d’une seconde en projection cordiforme, Recens et
integra orbis descriptio, s’inspirant de ses contemporains, mathématiciens et géographes.
Du point de vue des connaissances géographiques, ces mappemondes témoignent des nouvelles découvertes
et interrogations de l’époque. Dans une volonté d’équilibre des masses terrestres, nous pouvons y trouver
une vaste Terra Australis et observer, entre autres, que l’Amérique est reliée à l’Asie (le Mexique Messigo se
trouve ainsi à l’ouest d’une partie de la Chine Mangi).
Bien que lacunaires ou quelque peu imprécises (zones de Desertum notées par Fine), ces cartes marquent un
important progrès en comparaison de ce qui a été fait antérieurement. En effet, elles donnent, malgla dé-
formation due à la technique de projection, une image déjà relativement fidèle de la réalité. Fine est, de sur-
croît, le premier cartographe en France à avoir représenté les continents nouvellement découverts sur des
mappemondes et à en donner accès au public.
Défenseur des mathématiques en France, Oronce Fine a montré une vision souvent novatrice de nombreux
domaines scientifiques. Respecté par ses pairs, ses travaux ont donné lieu à de nombreuses publications et
traductions. En 1935, l'Union astronomique internationale baptise même un cratère lunaire "Orontius" pour
lui rendre hommage !
Auteurs: Aurore Damry Claude Venault BNF Gallica
voir l’article complet et illustré sur :
https://gallica.bnf.fr/blog/23072018/oronce-fine-la-croisee-des-sciences